Investir dans les CoCo Bonds (AT1)

Des noix de coco sur une plage paradisiaque. Symbole des CoCo bonds.

Introduction

En mars 2023, l’effondrement de Crédit Suisse a provoqué une onde de choc sur les marchés.

Parmi les victimes collatérales : les investisseurs en CoCo bonds, qui ont vu s’évaporer 17 milliards de dollars en une nuit.

Pour beaucoup, ce fut une découverte brutale : il existe des obligations qui ne se comportent pas comme les autres.

Créées après la crise de 2008, les CoCo bonds, ou AT1 (Additional Tier 1), sont des instruments hybrides conçus pour renforcer les fonds propres des banques.

Mais la vraie question pour un investisseur particulier est la suivante : faut-il s’y exposer ?

Ces obligations promettent des rendements élevés… mais elles peuvent aussi être annulées du jour au lendemain.

Que sont les CoCo bonds (AT1) ?

Les CoCo bonds (pour Contingent Convertible bonds), aussi appelés AT1 (Additional Tier 1), sont des obligations particulières créées après la crise financière de 2008.

L’idée de départ : renforcer la solidité des banques.

Au lieu de faire porter le risque uniquement aux États et donc aux contribuables, ces obligations permettent de transférer une partie du risque de faillite bancaire aux investisseurs.

Concrètement, un AT1 ressemble à une obligation classique :

  • il verse un coupon (souvent élevé, 5–7 % ou plus),
  • il est émis par une grande banque,
  • il sert à financer ses besoins de fonds propres.

Mais il y a une différence majeure :

  • si la santé financière de la banque se dégrade au-delà d’un certain seuil, l’AT1 peut être converti en actions ou carrément annulé.
  • de plus, la banque peut suspendre le paiement du coupon sans être considérée en défaut.

En résumé :

Les CoCos sont une dette hybride, à mi-chemin entre l'action et l’obligation, conçue pour protéger le système bancaire… mais pas forcément l’investisseur.

Pourquoi les CoCos attirent les investisseurs

À première vue, les CoCos semblent peu engageants : risque de perte totale, clauses complexes, volatilité élevée.

Et pourtant, ils trouvent preneur.

La raison principale tient en un mot : rendement.

Pendant longtemps, dans un monde de taux proches de zéro, les CoCos offraient des coupons de 5 à 7 %, parfois davantage. Pour des investisseurs institutionnels en quête de revenus réguliers, c’était une alternative séduisante.

D’autres arguments renforcent leur attrait :

  • Diversification : les CoCos ne réagissent pas tout à fait comme des obligations d’État ou des actions.
  • Stabilité perçue des émetteurs : ils sont émis par de grandes banques, parfois perçues comme « trop grosses pour faire faillite ».
  • Position de niche : certains investisseurs acceptent le risque pour ajouter une composante plus rémunératrice à leur poche obligataire.

En somme, les CoCos séduisent par leur rendement et leur rôle de diversification… mais il ne faut pas oublier le risque qu’ils portent.

Les risques spécifiques à connaître avant d’investir

Les CoCos ne sont pas des obligations classiques. Avant d’y investir, il faut être clair sur les risques qu’ils comportent :

  • Risque de perte totale

    Exemple marquant : en 2023, les détenteurs de CoCos émis par Crédit Suisse ont tout perdu, soit 16 milliards de dollars effacés. Ce n’est pas un accident isolé, c’est prévu dans leur fonctionnement : en cas de crise, l’investisseur encaisse la perte pour protéger la banque.

  • Suspension des coupons

    Contrairement à une obligation classique, une banque peut décider de ne pas verser le coupon sans être en défaut. C’est légal, prévu, et l’investisseur n’a aucun recours.

  • Volatilité extrême

    Les CoCos sont très sensibles aux crises bancaires : leur prix peut chuter brutalement si la confiance s’effrite dans le secteur financier.

  • Complexité des clauses

    Chaque émission de CoCo a ses propres règles (seuils de déclenchement, modalités de conversion, conditions de coupon). Lire un prospectus d’AT1 demande un solide bagage technique.

En clair : les CoCos offrent du rendement, mais en échange d’un risque asymétrique – vous pouvez percevoir des coupons pendant des années… puis tout perdre en un instant.

Comment investir en pratique ?

Pour un particulier, acheter directement un CoCo bond n’a que peu de sens :

  • Les tickets d’entrée sont souvent élevés.
  • La liquidité est limitée sur le marché secondaire.
  • Les clauses sont trop techniques pour être comprises sans expertise juridique et financière.

La voie la plus accessible est de passer par un ETF spécialisé.

Exemple : Invesco AT1 Capital Bond UCITS ETF.

Ses caractéristiques principales :

  • Il réplique un indice d’AT1 émis par de grandes banques internationales.
  • Le TER est de 0,39 %, ce qui reste compétitif pour un produit de niche.
  • Il existe en plusieurs versions (accumulatrice, distributrice).
  • Les performances récentes ont été solides (environ +7 à +9 % sur un an, selon la part).

L’avantage de l’ETF :

  • Diversification entre plusieurs émetteurs, plutôt que de porter le risque d’une seule banque.
  • Accessibilité : une part se négocie comme n’importe quel ETF coté en Bourse.

Mais attention :

  • La diversification n’efface pas le risque structurel.
  • En cas de crise bancaire généralisée, toutes les lignes de l’ETF seraient touchées.

En résumé : l’ETF simplifie l’accès aux CoCos, mais ne les transforme pas en produit « sûr ».

Quelle place dans le portefeuille d’un petit investisseur ?

Les CoCo bonds ne sont pas faits pour constituer le socle d’un portefeuille. Leur rôle est avant tout de renforcer la résilience des banques, pas celle des investisseurs.

Pour un particulier, l’approche raisonnable est de les envisager comme une poche satellite :

  • Jamais pour l'épargne de précaution.
  • Jamais comme cœur obligataire (qui doit rester simple : fonds euros, obligations d’État, ETF obligataires investment grade).
  • Éventuellement comme une petite fraction d’une allocation diversifiée, pour un investisseur averti, capable d’assumer une perte totale.

Le parallèle avec les cat bonds est intéressant : dans les deux cas, on parle d’instruments exotiques qui déplacent un risque particulier vers les marchés financiers.

Mais là où les cat bonds couvrent les catastrophes naturelles, les CoCos absorbent le risque bancaire.

Dans les deux cas, cela peut donner du sens comme diversification… à condition d’avoir déjà construit un portefeuille solide sur des bases simples.

Investir ou pas ?

Les CoCo bonds (AT1) sont un outil utile pour les banques : ils renforcent leurs fonds propres et absorbent les pertes en cas de crise.

Pour l’investisseur, en revanche, ce sont des instruments à manier avec prudence.

Oui, ils offrent des coupons élevés et une diversification originale. Mais le revers de la médaille est clair : le risque de perte totale existe, et il s’est déjà matérialisé.

En pratique, un particulier qui souhaite s’y exposer peut le faire via l’ETF Invesco AT1 Capital Bond UCITS, qui apporte diversification et accessibilité.

Reste que même via un ETF, ce type d’investissement doit rester marginal dans un portefeuille.

Pour aller plus loin