J'ai succombé au paiement fractionné : pourquoi c'est une mauvaise idée

Un couple hésitant à acheter un produit dans un magasin d'électroménager

Les beaux jours sont revenus, on a envie de prendre l'air. Oui, dans le Nord, on sort juste de l'hiver. Ne vous marrez pas, les sudistes ! Mon dada, c'est la course à pied. Alors ce week-end, j'ai décidé de renouveler ma vieille paire de baskets, qui a dépassé les mille bornes depuis longtemps. Je vais sur mon site favori (en bon frugaliste, je sais qu'ils ont toujours des promos) je choisis la paire de mes rêves et je passe au panier. Mais je ne sais pas ce qui m'a pris, j'ai payé cet article en 2 fois 😭. Ah, les promos… C'est là que le marketing donne le meilleur de lui-même. Oui, votre obligé qui n'arrête pas de vous rappeler que le crédit conso c'est mal se fait avoir comme un bleu. Alors cette petite aventure m'inspire une nouvelle série, qui s'appellera le vrai coût des choses. Aujourd'hui, on parle de l'illusion de la gratuité, comment les acteurs du e-commerce exploitent nos biais cognitifs et pourquoi le paiement fractionné est (presque) toujours une mauvaise idée.

La psychologie du paiement fractionné : quand le marketing rencontre la finance

On se croit rationnel, mais avouons-le : qui n'a jamais pensé « ça fait juste 75 € par mois, ça passe » ? C'est exactement ce que les marchands veulent nous faire croire. Et ils excellent dans cet art. Voici leurs techniques d'influence :

  • Le biais de mensualisation : La transformation d'un montant important en petites mensualités est un grand classique. Un achat de 300 € devient seulement 75 € par mois sur 4 mois. Le prix total s'efface, seule la mensualité reste visible. Et voilà comment on tombe dans le piège.
  • L'illusion de la gratuité : Sans frais ? Vraiment ? En réalité, les frais se cachent ailleurs : prix de base gonflé, réductions moins avantageuses, ou pénalités de retard. Et même sans frais apparents, c'est toujours un crédit qu'il faut rembourser.
  • L'urgence et la rareté : Offre valable ce week-end uniquement !, Plus que 2 articles en stock ! Ces phrases sont conçues pour déclencher l'achat impulsif. On ne réfléchit plus, on clique... et on regrette.
  • La déresponsabilisation : Profitez maintenant, payez plus tard ! Les prestataires de paiement adorent cette approche. Elle nous déconnecte de la réalité : on obtient le produit, mais le moment désagréable du paiement est repoussé. Les prélèvements peuvent s'accumuler sans qu'on s'en aperçoive.
  • La gratification instantanée : On obtient ce qu'on désire immédiatement.

Oui, c’est un crédit – Ne vous mentez pas !

Les fintechs et les commerçants rivalisent d'ingéniosité en profitant d'un flou réglementaire. Techniquement, il s'agit d'une facilité de paiement moins réglementée qu'un crédit à la consommation classique. Comme les mensualités sont limitées à trois mois maximum, les contraintes du crédit à la consommation ne s'appliquent pas. C'est précisément ce qui rend cette pratique dangereuse : vous ne bénéficiez pas des mêmes protections (ou plutôt garde-fous).

Soyons clairs : un paiement fractionné, c'est un crédit. Vous devez de l'argent à quelqu'un. Peu importe qu'on l'appelle « sans frais » ou « payez plus tard ». On vous avance de l'argent, et vous devez le rembourser. Point final.

Les marchands ne le proposent pas par générosité. Ils savent pertinemment qu'on dépense davantage avec le paiement en plusieurs fois. Résultat ? Un panier moyen plus élevé et des ventes qui explosent. En fin de compte, leurs profits augmentent, pendant que notre endettement risque de suivre la même courbe.

Qui paye les frais ?

Et là, on arrive à une question clé : si ce n’est pas vous qui payez les frais, alors c’est qui ??

En réalité, ce sont souvent les commerçants ou parfois même les fabricants, comme Samsung ou Apple, qui absorbent le coût du crédit. Les commerçants paient une commission aux prestataires de paiement, ce qui leur permet de proposer le "sans frais" sans que vous ayez l’impression de payer plus cher. Mais ne vous y trompez pas : ce coût est intégré quelque part, soit dans le prix global du produit, soit dans le coût des services additionnels.

Bref, la gratuité n’existe pas. Quelqu’un, quelque part, paye toujours.

Quand est-ce acceptable ?

C'est là où je devrais me trouver des excuses, mais non. L’achat de mes baskets était prévu, je l'avais budgétisé, et j'aurais pu le payer cash. J'ai juste cédé au biais de la mensualisation. Mais il y a peut-être des cas où le paiement fractionné peut se justifier, sans pour autant basculer dans le piège du crédit facile.

  • Achat stratégique : Un outil de travail qui va générer un retour sur investissement rapide. Là, ça se discute.
  • Urgence imprévue : Un réfrigérateur qui tombe en panne, un ordinateur qui lâche. Si vous n'avez pas d'épargne de secours, le paiement fractionné peut dépanner. Mais idéalement, vous devriez déjà avoir constitué une épargne de précaution.

Dans tous les cas, il faut que ce soit un achat planifié, budgétisé et intégré dans vos finances. Sinon, c’est le début des galères.

Attention au surendettement : le crédit est un glissement progressif

Les chiffres ne mentent pas : le crédit à la consommation explose. En 2024, l’encours total des crédits conso en France a dépassé les 200 milliards d’euros. Et devinez quoi ? Les paiements fractionnés y contribuent de plus en plus. Il suffit de voir le nombre d'acteurs fintech qui prospèrent sur ce créneau : Klarna, Alma, Floa, Oney…

Pourquoi ? Parce qu’on banalise ces petits crédits. 50 € ici, 75 € là, et on se retrouve avec des prélèvements qui s’accumulent jusqu’à ne plus rien contrôler.

Conclusion : La leçon que j’ai apprise

D'abord, relativisons : j'ai une épargne de précaution, et grâce à mon budget loisirs qui respecte la règle 50-30-20, cet achat était déjà prévu, et je compenserai simplement en réduisant mes dépenses le mois prochain.

Ensuite, j'ai réalisé que même en étant convaincu des dangers du crédit, on peut facilement se laisser séduire. Le paiement en plusieurs fois est une tentation habilement déguisée en opportunité. Sans vigilance, on glisse rapidement vers de mauvaises habitudes.

Ma conclusion ? À l'avenir, je me poserai une question toute simple : Si je devais payer comptant maintenant, est-ce que je le ferais ? Si la réponse est non, c'est que je n'en ai pas vraiment besoin.

Et vous ? Quels sont les achats récents que vous avez "étalés" et pourquoi ?

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